Notre Constat
Constat n°1
C’est le manque de connaissance précise de leur réseau qui empêche les gestionnaires de le maintenir dans des conditions techniques, politiques, économiques et environnementales optimisées et non le manque de budget.
Constat n°2
La référence à la valeur à neuf du patrimoine routier français pour dire qu’il n’y a pas assez de moyens financiers pour l’entretenir correctement est dénuée de fondement. Ne serait-ce qu’un argument de lobbyistes réclamant uniquement des moyens financiers supplémentaires ?
Constat n°3
Les travaux routiers ne durent pas assez longtemps, pour des raisons de choix et de compétences et non seulement pour des questions d’argent.
La connaissance des infrastructures routières en France
Le réseau français globalement
2 rapports issus de 2 sources officielles, des chiffres différents : 1.071.200 km de toutes pour 101 départements pour l’Observatoire National de la Route de l’IDRRIM, 1.091.651 km pour 95 départements pour l’Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière !
Et que signifie un km de routes lorsqu’il est question de l’entretenir ? S’agit-il …
Jean-Paul Sartre, peu connu comme spécialiste des routes, parle de m² d’autostrade dans son roman « Les chemins de la liberté » en regard des impôts versés. C’était en 1947.
En 2020, pour parler de patrimoine routier, on parle de km. N’est-ce pas surprenant ?
L’imprécision des seules données quantitatives laisse imaginer l’encore moins grande précision des données qualitatives. Une route est constituée de km de linéaires sur plusieurs voies pour former des m² à entretenir, encore convient-il de mesurer les largeurs avec pertinence, de définir si l’entretien de cette surface se fait en pleine largeur ou voie par voie, selon les types de mobilité par exemple, mais également de giratoires, de bretelles d’entrée-sortie, de ralentisseurs, de tourne-à-gauche… bref, d’un ensemble d’objets routiers à entretenir. On est donc loin des simples km pour prétendre connaître son réseau.
Le réseau français, quantitativement
En 2020, pour parler de patrimoine routier, on parle de km. N’est-ce pas surprenant ?
Les raisons ?
Pour un certain nombre de raisons parmi lesquelles on peut citer, sans que cette liste soit exhaustive :
- Les différentes étapes de la décentralisation avec les transferts de propriété des routes.
- Les réorganisations techniques et administratives entre l’Etat (les DDE pour faire simple) et les collectivités.
- Les évolutions technologiques pour enregistrer le patrimoine routier, du cahier à l’informatique centralisée non communicante puis au Système d’Information Géographique inadapté.
les gestionnaires ont une mauvaise connaissance quantitative des réseaux qu’ils ont la responsabilité de maintenir en état.
Pour s’en convaincre, il suffit de lire 2 rapports émanant des services de l’Etat ; le rapport ONR (Observatoire National des Routes) de 2019 et le rapport de la sécurité routière 2018.
On observe des différences significatives de linéaires de routes départementales et communales, surtout en considérant que le rapport de la sécurité routière ne compte que les routes métropolitaines quand le rapport ONR prend tous les départements d’outre-mer.
En synthèse, la France compte plus d’1.000.000 km de routes (terme impropre car il faudrait parler d’itinéraires) et de l’ordre de 250.000 ouvrages d’art (à 50.000 près) si on se réfère aux données généralement publiées et utilisées. Sa valeur à neuf est estimée à 2.000 Milliards €, là encore, selon les chiffres habituellement utilisés.
L’influence des lobbys a été telle que les gestionnaires ont fini par se laisser convaincre que « globalement le patrimoine se dégrade par manque de moyens financiers » alors même qu’ils savent très bien que tel n’est pas le cas. Notre association vise à remettre cela en cause en les aidant à mobiliser leur esprit critique et à utiliser leur bon sens.
Ainsi, voyons comment ces chiffres révèlent le déficit de connaissances :
Comment gérer et entretenir ce qu’on ne connaît, ni en quantité, ni en qualité ?
Si la notion de km de routes est adaptée à la construction car il s’agit de relier un point à un autre, elle est inappropriée à l’entretien qui porte sur des surfaces. On équipe sa maison de volets en nombre mais le peintre calcule le prix pour les repeindre en fonction de leurs types et de leurs surfaces.
Le nombre d’ouvrages d’art n’est pas davantage signifiant. Un ouvrage d’art maçonné ne s’entretient pas comme un ouvrage en béton ou en métal. Sa surface est également un élément déterminant. L’entretien d’un volet en bois ne se fait pas à la même fréquence qu’un volet en aluminium ou en plastique. Le coût dépend de la taille, de la surface, des opérations à réaliser.
La valeur à neuf n’est pas davantage une référence. L’entretien est relatif à un état de service attendu, pas à un état neuf. On n’entretient pas sa voiture pour qu’elle soit neuve en permanence. On l’entretient pour qu’elle roule avec un certain niveau de sécurité, de fiabilité, de confort.
Le réseau français, qualitativement
L’imprécision des seules données quantitatives laisse imaginer l’encore moins grande précision des données qualitatives. Une route est constituée de km de linéaires sur plusieurs voies pour former des m² à entretenir, encore convient-il de mesurer les largeurs avec pertinence, de définir si l’entretien de cette surface se fait en pleine largeur ou voie par voie, selon les types de mobilité par exemple, mais également de giratoires, de bretelles d’entrée-sortie, de ralentisseurs, de tourne-à-gauche…bref, d’un ensemble d’objets routiers à entretenir. On est donc loin des simples km pour prétendre connaître son réseau.
Les routes
Alors que toutes les références habituellement utilisées sont des kilomètres, une route s’entretient en surface et profondeur. Le coût d’entretien d’une route se réfère en conséquence :
- à des m² d’abord et des objets routiers spécifiques à entretenir puis,
- à une technique d’entretien ou une solution d’entretien qui précise l’épaisseur des travaux
alors que toutes les références habituellement utilisées sont des kilomètres. (cf ci-dessus).
La connaissance de l’état qualitatif d’un réseau routier peut être réalisée de plusieurs façons. Le relevé de l’état au moyen d’appareils d’auscultation à grand rendement a fait l’objet de beaucoup de publications, de guides, de séminaires depuis leur origine, c’est-à-dire le milieu des années 90. Pourtant, le taux de pénétration reste faible et la méthode historique a énormément vieilli comparée à l’environnement numérique de 2020.
On a mesuré en analysant des appels d’offre et consultations lancés ces 4 dernières années que :
Seuls 17% des départements auscultent régulièrement l’état des dégradations sur leur réseau et moins de 2% des communes ou communautés de communes ou métropoles.
Ces chiffres convergent vers les résultats publiés dans le rapport ONR indiquant que 18% des départements ont un système de notation issue d’auscultations à grand rendement.
Ces chiffres sont encore plus faibles si on regarde la mesure de l’adhérence des chaussées. On mesure à travers l’analyse des appels d’offre que moins de 1% des itinéraires des départements ou communautés de communes ou métropoles sont contrôlés relativement à ce critère.
Le rapport de l’ONR 2019 est très parlant et sans vouloir être désagréable confirme cette méconnaissance plutôt qu’une connaissance. La figure ci-dessous est très explicite. Seuls les départements auscultant leur réseau au moyen d’appareils à grand rendement sont capables de calculer un indicateur qualitatif de type IQRN (Indice Qualité des Routes Nationales)/IQRD (Indice Qualité des Routes Départementales) ou notation externe. Ils ne sont donc au total que 18% de l’échantillon. Près de la moitié (48% pour pas de notation ou non précisé) n’a dans les faits aucun système de notation (évaluation qualitative), quant à la notation interne, on peut imaginer ce qu’il en est. Il faut ajouter à cela que ces systèmes de notation sont « grosse maille ». Lorsqu’on regarde les métadonnées des données utilisées, il y a matière à s’interroger dans le contexte numérique de 2020. Un certain nombre de gestionnaires reconnaissent ne pas être capables d’établir un programme de travaux sur la base de ces indicateurs. A titre de comparaison : que signifie avoir un parc automobile en bon état général ? en quoi savoir que 15% du parc est en mauvais état permet de planifier des travaux sur les véhicules concernés ?
Après avoir interrogé 12 EPCI sur les 1237 existants, l’ONR a obtenu 4 réponses. Aucune n’est capable de répondre sur la manière dont elle gère son patrimoine. 4 ont su donner des chiffres relatifs à leur dépense. Cela en dit long sur la connaissance du patrimoine géré.
La figure ci-dessous du rapport ONR 2019 montre également la très grande complexité de ces regroupements, tous les EPCI n’ayant pas choisi les mêmes domaines de compétences.
Les ouvrages d’art
Les ouvrages d’art ne sont pas mieux lotis. Si on se réfère au rapport ONR 2019, les méthodes d’auscultation sont un peu plus homogènes, les départements mettant en œuvre la méthode visuelle préconisée par le CEREMA lorsqu’ils les réalisent. Ils ne sont pourtant que 50% à le faire.
Comme les métropoles, ils utilisent majoritairement le système de notation IQOA (Indice Qualité des Ouvrages d’Art) du CEREMA pour les évaluer qualitativement. Tout comme les méthodes IQRN/IQRD, il faut considérer ces indices comme étant « grosse maille ».
Il faut noter qu’aucune question et a fortiori aucune réponse ne concernent l’appareillage des ouvrages en dispositifs de mesure automatiques, en temps réel par exemple.
La valeur du patrimoine n’est pas le bon indicateur pour définir le budget d’entretien
La valeur à neuf n’est pas une référence pour définir un budget d’entretien. L’entretien est relatif à un état de service attendu, pas à un état neuf. On n’entretient pas sa voiture pour qu’elle soit neuve en permanence. On l’entretient pour qu’elle roule avec un certain niveau de sécurité, de fiabilité, de confort. Il en va exactement de même pour les routes ou les ouvrages d’art.
Les chiffres avancés de la valeur à neuf du patrimoine routier français par ceux qui, in fine, demandent que davantage de moyens financiers soient dévolus à son entretien ne font que confirmer notre constat n°1. La mise en avant de ce chiffre est la preuve que les gestionnaires ne connaissent pas leurs besoins et qu’en conséquence, ils ne sont pas en mesure de justifier leurs demandes.
Par ailleurs, les gestionnaires techniques ne sont pas aidés par la comptabilité publique qui ne « connaît » pas, au sens comptable du terme, les infrastructures.
Une des injonctions contradictoires, mais malheureusement, ce n’est pas la seule, auxquelles sont confrontés les décideurs politiques locaux est que les actifs qu’ils doivent entretenir ne figurent pas dans leur comptabilité. Ainsi une dette levée pour entretenir un actif alourdit bien la dette mais sans contrepartie comptable. L’Institut Montaigne avait d’ailleurs été assez cruel dans son analyse pré électorale des finances publiques locales pointant du doigt les collectivités dont l’endettement avait augmenté sous la mandature en cours. En effet, une collectivité qui n’entretenait pas ses actifs et créait de la « dette grise » était considérée comme bien gérée sous cette toise, et celle qui s’était endettée pour les entretenir était considérée comme mal gérée. L’actualité récente nous a rapporté que certains immeubles marseillais s’étaient effondrés, faute d’entretien et donc porteur d’une énorme dette grise. Pourtant, sous l’angle financier de la comptabilité publique, le propriétaire les avait bien gérés, ne s’étant pas endetté pour les maintenir en état. Parallèlement, des études ont démontré que la rénovation de bâtiment est plus vertueuse au plan environnemental que la démolition suivie d’une nouvelle construction. L’intensité de main d’œuvre à l’euro dépensé nécessaire à la rénovation est également plus grande que dans la construction, favorisant l’emploi. Il en va exactement de même pour les infrastructures routières.
Les travaux routiers en France : la théorie et la pratique
Les travaux routiers sont réalisés sans aucune garantie de durabilité.
Leur performance dans le temps n’est pas contractualisée.
Le modèle théorique n’intègre pas les maintenances préventives et curatives localisées.
Il n’existe aucune statistique permettant de connaître la durée de vie réelle des travaux par nature pour la comparer à la durée de vie attendue.
En conséquence, il n’existe aucune analyse des écarts constatés.
« Ce qui ne se mesure pas ne progresse pas »
L’industrie routière n’a pas encore intégré toute l’importance du process de l’amélioration continue
Dans ces conditions, impossible de travailler dans le cadre vertueux de l’amélioration continue, de briser le cercle de l’irresponsabilité collective, irresponsabilité financière mais également environnementale. L’obsolescence des travaux routiers est “programmée” et on pourrait s’attendre dans l’environnement sociétal actuel que l’industrie, alignant son comportement sur les autres, travaille à retarder cette obsolescence. Dans la réalité, nous constatons que l’obsolescence réelle est plus rapide que l’obsolescence “programmée”. Nous en connaissons les raisons. Notre projet apporte une solution pour y remédier.
Selon le rapport ONR 2019, les travaux routiers réalisés annuellement en France pour le seul entretien, c’est à dire, hors travaux destinés à de nouvelles infrastructures s’élèvent à près de 14 Milliards €. Il est tout de même perturbant de se dire que chaque année, ce montant est dépensé sans que l’on connaisse son impact sur la qualité du réseau routier français dans son ensemble, sans que l’on fixe les objectifs attendus de ces dépenses, sans que l’on mesure l’atteinte ou non de ces objectifs …… et sans qu’on puisse davantage mesurer l’impact de ces dépenses sur l’environnement, les émissions de CO², la quantité de cailloux prélevée dans les carrières, la pollution de l’air…..
14 Milliards € dépensés annuellement pour entretenir les routes en France sans mesure d’efficacité et sans mesure d’impact sur l’environnement, les émissions de CO², la quantité de cailloux prélevée dans les carrières, la pollution de l’air…..
C’est comme si on changeait les pneumatiques d’une voiture sans s’interroger sur la durée de vie attendue de ces derniers. Devant les changer après 5000 km, on trouverait normal de les remplacer. Sans budget pour en acheter d’autres, on trouverait normal de rouler avec des pneumatiques en mauvais état. En aucun cas, on ne s’interrogerait sur la qualité des dits pneumatiques, les circonstances de leur usure, on ne comparerait les fabricants entre eux. Qui considérerait que seul, le manque de moyen financier est la cause de rouler avec des pneumatiques en mauvais état ?
La route = une construction basée sur l’obsolescence “programmée”
La technique routière française est basée sur un dimensionnement calculatoire, mathématique, solide, basée sur le vieillissement, l’usure, la fatigue des matériaux selon les contraintes exercées par le trafic pour un cadre climatique donné …..
C’est ce que représente le schéma ci-dessous issu d’un rapport USIRF « FDES-USIRF_Rapport.pdf » (structure initiale de la chaussée) :
Et, toujours selon la même méthode scientifique et selon les hypothèses de contraintes retenues, le modèle français permet de calculer les différentes étapes d’entretien :
Une obsolescence “programmée” même pas atteinte !
Compte-tenu de ce qui précède, comment en arrive-t-on à devoir constater en circulant sur nos routes toutes ces dégradations, fissures, faïençages, nids de poule, arrachements, ornières, déformations … ?
On peut certainement trouver de multiples explications mais une est certaine : il y a une énorme différence entre la théorie et la pratique.
Un écart significatif entre théorie et pratique.
L’absence de contrôle technique, au sens large du terme, tant au moment du choix de la solution à mettre en œuvre que lors de la mise en œuvre.
Attardons-nous sur un cas concret :
- Le calcul théorique indique que l’épaisseur d’une couche de chaussée doit être de 6 cm collée parfaitement, c’est à dire, en tous points à la couche précédente (comme dans le schéma ci-dessus)
- Cela signifie que cette épaisseur DOIT être de 6 cm sur l’ensemble de la surface recouverte et non de 7 cm à certains endroits et 5 cm à d’autres pour en moyenne faire 6 cm ET qu’elle doit être collée en tous points à la couche inférieure
- Les travaux ne sont pas facturés en fonction de ces 6 cm mais en tonnes mises en œuvre pour recouvrir une certaine surface de 6 cm.
- Les dégradations localisées présentées ci-dessus peuvent avoir pour origine le non respect de la consigne de l’épaisseur ou du collage en tous points ou le non respect des formulations de matériaux, ou bien d’autres raisons.
- Il faut alors s’interroger sur les moyens de contrôle déployés pour garantir le respect de toutes ces contraintes. La réalité est, que peu de ces contrôles sont effectués.
- Pour ne prendre que l’exemple du respect de la consigne des épaisseurs en tous points de la surface, les techniques actuelles, non destructives, permettent de les mener. Malheureusement, dans le meilleur des cas, des contrôles destructifs ponctuels sont réalisés.
Les contrôles réalisés dans les travaux reviennent, lorsqu’il y en a et dans le meilleur des cas, à contrôler la pression d’un pneumatique pris au hasard, la roue de secours par exemple et considérer que tous les pneumatiques ont la même pression dans un parc automobile comptant plusieurs centaines de véhicules.
Qui accepterait une telle démarche pour assurer sa sécurité ? qui considérerait que cette méthode est scientifique ? qu’elle permet de s’améliorer, de progresser ?
Les conséquences de ces (mauvaises) habitudes
En conséquence, on répare comme ci-dessus (avec plus ou moins de bonheur et de durabilité) ou pas, comme ci-dessous :
Tous ces défauts, toutes ces non-qualités ont des conséquences sur les budgets et sur l’environnement.
Les matériaux mis en place n’ont pas été usés conformément à ce qu’ils pouvaient délivrer. Ils ont été gaspillés. Les nouveaux matériaux mis en œuvre le sont dans de mauvaises conditions la plupart du temps. Ils ont encore moins de chance de délivrer tout ce qu’on peut en attendre, compte-tenu à la fois de l’incapacité à les dimensionner correctement et surtout compte-tenu des conditions de mise en œuvre dans l’urgence, dans des conditions d’intervention pas toujours propices. Les photos le prouvent d’ailleurs.
Les efforts vains de l’industrie routière pour réduire ses impacts sur l’environnement
Les efforts faits par l’industrie routière pour limiter ses impacts environnementaux à travers l’innovation comme les enrobés tièdes pour se substituer aux enrobés chauds, puis au réemploi des agrégats d’enrobés dans les nouveaux enrobés fabriqués sont certes louables.
L’industrie routière ne souffre-t-elle pas du même casse-tête que l’oncle bricoleur de Boris Vian dans la chanson « La java des bombes atomiques » ?
Il a bossé pendant des jours
Boris Vian
Tâchant avec amour d’améliorer l’modèle (en l’occurrence ici, les enrobés chauds par les enrobés tièdes, l’augmentation du taux de recyclé dans les enrobés chauds)
Quand il déjeunait avec nous
Il dévorait d’un coup sa soupe aux vermicelles
On voyait à son air féroce qu’il tombait sur un os
Mais on n’osait rien dire
Et puis un soir pendant l’repas
V’là tonton qui soupire et qui s’écrie comme ça
Voilà des mois et des années que j’essaye d’augmenter la portée de ma bombe
Et je ne m’suis pas rendu compte que la seule chose qui compte
C’est l’endroit où s’qu’elle tombe (en l’occurrence ici, s’assurer que l’enrobé chaud est mis en œuvre conformément à sa formulation et à son dimensionnement).
La valorisation par un cas concret :
La société VECTRA avait réalisé une étude pour le compte d’une société concessionnaire d’autoroutes il y a quelques années afin d’établir l’état de la chaussée après quelques années de mise en service et avant son 1er entretien, exactement selon les termes et le principe général décrit ci-dessus.
Grâce à une bonne réalisation des travaux notamment le respect des épaisseurs en tous points, la présence d’une couche d’accrochage et grâce au respect de la formulation de l’enrobé (grave bitume), la durée de vie avait été multipliée par presque 1,5 hors impact du trafic et 2 avec l’impact du trafic, ce dernier ayant été inférieur au trafic prévu pour le dimensionnement. Seule une section de 230 mètres avait été mal réalisée et devait être complètement reprise.
Cet exemple apporte la preuve que lorsque les travaux sont pensés, réalisés et contrôlés conformément au modèle, les matériaux mis en œuvre délivrent bien tout ce qui est attendu.
Les limites de l’approche théorique basée sur la fatigue des matériaux
Le scénario d’entretien théorique présenté ci-dessus ne repose que sur l’usure, sur la fatigue des matériaux soumis aux contraintes du trafic.
Il existe d’autres interactions de la chaussée avec son environnement, interactions qui influent sur le vieillissement des matériaux mis en œuvre, hors usure.
C’est ainsi, pour ne citer que deux exemples :
- les matériaux employés dans la construction des différentes couches de chaussées n’ayant pas les mêmes caractéristiques d’élasticité, lors de leur maturation, ils vont évoluer différemment et des fissures vont apparaître en surface. Ces fissures laissent pénétrer l’eau ; elle va modifier la cohésion des matériaux indépendamment de l’usure lié au trafic et réduire la durée des vies de ces derniers, non en usure mais en dégradation prématurée. L’expression « Geler à pierre fendre » illustre ce phénomène : La pierre n’est fendue que par la présence d’eau à l’intérieur de la pierre qui, se dilatant en gelant, fend la pierre. Les techniques de mouillage de coins en bois pour faire éclater les blocs de pierre dans les carrières égyptiennes ou romaines illustrent bien également ce phénomène.
- Il en va de même pour l’eau résiduel dans les accotements des chaussées. Elle modifie la capacité portante de la chaussée. En conséquence cette moindre portance va fragiliser les couches de matériaux rigides mises en surface selon l’image d’une plaque de verre sur un matelas.
Des interventions de maintenance préventives et curatives sur l’environnement immédiat de la chaussée et sur la chaussée elle-même vont permettre de traiter ces pathologies, de neutraliser ces interactions, permettant aux matériaux en place de travailler comme le modèle l’avait prévu et donc de se fatiguer et de s’user conformément au modèle et non prématurément.
La maintenance préventive consiste en des interventions visant à rendre étanche la surface de chaussée (pontage de fissures, enduit superficiel ou matériau bitumineux coulé à froid) ou encore d’interventions liées à l’évacuation de l’eau du corps de chaussée pour en augmenter la portance, autour de la chaussée, telle que curage des fossés, dérasement des accotements, taille des arbres, réduction des arbustes…. La maintenance curative consiste en des réparations localisées de dégradations apparues indépendamment du modèle théorique mais qui, réalisées correctement et au moment approprié, prolongent la durée de vie de l’ensemble de la surface de la chaussée.
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